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Pensées pour nous-mêmes:
(N'ATTENDS RIEN DU TEMPS.
IL NE FAIT QUE PASSER)
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COURTS RÉCITS AU LONG COURS(60)
pcc Benoît Barvin
Pour Gudule,
Écrivaine au long cours
et à la superbe chevelure brune
Placard
J'étais tranquillement installée sur le canapé quand la sonnette d'appel retentit. Ce n'est qu'au bout de la troisième sonnerie aigre que je déposai la tablette, sur laquelle je lisais une "solitude" d'écrivain, et que je me dirigeai vers la chambre 113. L'occupait une brave petite vieille - Madame F... - que je découvris, terrifiée, à demi-nue dans son lit.
"Le... Le Monstre" bredouilla-t-elle, en désignant le placard usuel destiné à ranger ses affaires personnelles. Je tentai de la calmer, mais elle claquait des gencives - elle dormait sans son dentier -, tout en indiquant la direction de la petite armoire en faux merisier, sur laquelle j'avais collé quelques photos de la propriétaire du temps de sa jeunesse.
En soupirant je m'y rendis, alors que la vieille dame se recroquevillait en torturant ses draps. J'ouvris les battants et n'y découvris évidemment rien d'autre que ses vêtements et sous-vêtements, ainsi qu'un vieux sac miteux qu'elle avait tenu à conserver. "Le... Le Monstre", ne cessait-elle de marmonner et je dus convenir, avec un certain déplaisir, qu'elle avait peut-être eu un AVC. Dans ce cas, je devais en référer à ma supérieure hiérarchique qui en ce moment, je le savais, s'envoyait en l'air avec le jardinier. Pas question, donc, de la déranger dans ses occupations tantriques.
Je tentai de nouveau d'apaiser Madame F. mais impossible, dans l'état de confusion où elle se trouvait. Elle me parla "d'esprit maléfique" qui venait lui "tirer les pieds" et qui plus est, avait fait des "gestes obscènes". Bref, elle débloquait complètement. Je lui proposai deux cachets de Lexomil qui firent rapidement effet. Je sortis en hâte de la chambre, ayant hâte de retrouver mon havre de paix et ma lecture. Il ne me restait que quatre heures à tirer car, tiens, on venait juste de dépasser minuit.
Je venais de me rasseoir dans le canapé quand une nouvelle sonnerie perçante me fit sursauter. Cette fois il s'agissait d'une chambre au second étage de la maison de repos qui avait besoin de mon aide. Madame D., ancienne courtisane, me désigna comme Madame F. le placard. Son visage anciennement avenant était décomposé par la peur. Cette fois il ne s'agissait pas d'un "Monstre", mais d'une "Sorcière". Et celle-ci, d'après la vieille dame à qui je fis avaler deux cachets de somnifères, en voulait à sa vertu. J'ânonnai des paroles de réconfort, les paupières lourdes, la fatigue plombant mes membres.
C'est en revenant dans mon réduit meublé du canapé et d'une table sur laquelle reposait une plaque électrique, que je m'avisai de la présence, là aussi, d'un placard. C'était un vieux machin métallique, très laid, dans lequel je ne mettais mes vêtements qu'avec répugnance. Je secouai les épaules, chassant les mauvaises pensées qui tentaient de m'obscurcir l'esprit mais, l'heure suivante, trois autres patientes m'appelèrent au secours. Elles avaient toutes en commun de désigner leur placard personnel comme fauteur de troubles. Dans l'un était sorti un dragon, l'autre avait contenu une fée maléfique et le dernier, lui, recelait le "Chien des Enfers", tout simplement.
La Pleine Lune n'expliquait pas cette épidémie de terreurs enfantines, je le savais. Comme elle n'expliquait pas la soudaine transformation qui s'était opérée dans la chevelure de mes pensionnaires. Elles qui possédaient, chacune, d'adorables cheveux d'anges, sous le coup de la peur avaient vu cette blancheur se teinter soudainement d'un beau noir soutenu. Madame F., Madame D. et les trois autres vieilles dames arboraient à présent une magnifique toison brune...
Cette inversion de la légende qui veut qu'une grande terreur blanchisse votre crinière me dépassait, je le confesse. Mais il devait y avoir une explication scientifique à ce phénomène et...
A cet instant de ma réflexion inquiète, j'entendis un drôle de petit bruit. Il provenait, bien évidemment, du placard détesté. Je jetai un oeil sur la porte à double battant qui, lentement, en grinçant, s'effaçait. Pour laisser la place à qui? Ou à quoi?
Je jetai un oeil dans le miroir installé sur la table. On y voyait mon visage, un peu pâle, c'est vrai, mais on se fixait surtout sur la belle crinière d'un blanc de neige qui ceignait ma tête, comme une couronne. Quelque apparition que ce soit, elle allait avoir une sacrée surprise en émergeant du Monde de mes cauchemars...
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"La Lala La La...
- Ding... Ding...
- La Lala Lâ Lâ...
- Ding... Dong..."
The Duet by Frank Dicksee
(Méchant méchant Jacques Damboise!
Tu seras puni pour ces puériles moqueries)
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"Maman, Maman, un p'tit burger...
Rien qu'un p'tit... Je f'rai que l'goûter du bout des lèvres..."
Talbot Hughes (1869 - 1942)- The path of True Love never did run smooth, 1896
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"Oh Non, Di-eu des z'Enfers! Que m'as-tu donc fait, didon...
- Heu... Merci... On vous écrira..."
Orpheus’ Sorrow - Pascal Adolphe Jean Dagnan-Bouveret
(via abystle)
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"Je vole, je vooole...
- Maman, fais gaffe! Tu fais un mauvais speed"
llustrations from ‘The sensitive plant’ by Percy Bysshe Shelley.
Introduction by Edmund Gosse, illustrations by Charles Robinson.
Published 1911 by William Heinemann, London.
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Blanche Baptiste (en mauvaise compagnie, celle de Jacques Damboise)
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