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Pensées pour nous-mêmes:
(TU ENGENDRES TOI-MÊME
TA PROPRE MISÈRE)
Pensées pour nous-mêmes:
(TU ENGENDRES TOI-MÊME
TA PROPRE MISÈRE)
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COURTS RÉCITS AU LONG COURS(56)
pcc Benoît Barvin
Joyeux quadrille
Tenace, la bruine sale s'étendait sur la ville depuis le début de la matinée, tissant une gigantesque toile d'araignée humide. J'aurais reconnu Albert entre mille. Il portait toujours son vieux trench‑coat Bogartien, arborait un visage en lame de couteau avec le nez cassé, signature d'une ancienne rixe, du temps où il jouait les gros bras dans les boîtes interlopes de la côte.
Il était mal dissimulé sous une porte cochère mais l'indic ne m'avait pas menti. C'était bien l'Albert que je connaissais; l'homme à qui j'avais, un soir, sauvé la mise alors que, venant d'évacuer un para qui parlait trop fort, il s'était retrouvé face à un poignard de combat qu'une main couturée de cicatrices s'apprêtait à lui fourrer dans le ventre.
J'étais intervenu avec la célérité qui me caractérise. Rapide tranchant de la main sur celle du soûlard et, pour parfaire le travail, coup violent du genou dans la face rougeaude du para, face qui avait craqué. Le type s'était effondré en arrière comme un arbre mort.
Depuis, Albert et moi nous étions les meilleurs amis du monde. Amis... enfin, façon de parler. Des potes, plutôt. Quand j'avais besoin d'un tuyau garanti or premier carat, d'une adresse complaisante ou bien de tout autre service de ce genre, je savais compter sur Albert.
J'avais sûrement dû abuser, d'ailleurs, car il avait soudainement disparu deux années auparavant. Et voilà que je remettais la main dessus, trempé et l'air morose, le visage vieilli prématurément. L'air aussi gai qu'un entrepreneur de pompes funèbres qui vient d'apprendre qu'un savant a découvert le secret de la vie éternelle.
‑ Ah, c'est toi? Si tu pouvais te casser... Je travaille, a‑t‑il grogné en faisant mine de sortir de sa cachette et de suivre une silhouette incertaine, là‑bas, près du passage clouté. Incertaine mais gironde, me sembla‑t‑il.
‑ J'ai envie de t'accompagner. En souvenir du bon vieux temps
Albert s'est retourné brutalement. Ses yeux avaient changé de couleur. Ils étaient gris, cette fois, et durs. Coupants comme le silex.
‑ Je viens de te dire...
‑ J'ai entendu.
‑ Et si je te cassais la gueule, en souvenir, justement...
‑ Je t'ai sauvé la vie. Tu te souviens? (et sans lui laisser le temps de répliquer, j'ai ajouté). J'ai une affaire à te proposer. Facile et bien payée. On se cherche un endroit moins venteux, O.K.?
Il a pesé le pour et le contre. Son visage aux sourcils épais au bord desquels perlait une goutte se sont relevés. Il a fini par esquisser un vague sourire qui a découvert des dents aurifiées.
‑ Tu pouvais pas le dire tout de suite?
‑ J'adore faire des surprises.
- Je sais, a-t-il soufflé, en faisant la grimace.
***
C'est lui qui a choisi le troquet. Un tripot peu ragoutant, mais je n'avais pas oublié d'où je venais. C'était comme un retour aux sources. Fallait pas trop faire le difficile... J'ai trempé délicatement mes lèvres dans la mousse d'une bière tiédasse.
‑ L'affaire, j'ai commencé, est à la portée d'un gosse. Tu dois suivre une fille, une dénommée Isabelle. Tu la files pendant la journée, en faisant gaffe à pas te faire repérer. Tu rends compte de la filature à vingt heures tapantes, à ce numéro (je lui tendis un bout de papier avec un numéro de téléphone hâtivement griffonné). C'est tout. C'est payé cent cinquante billets par jour.
‑ Puisque c'est si facile, qu'il a fait en buvant d'un coup la lavasse comme s'il s'était agi de petit lait, pourquoi tu fais pas le boulot toi‑même?
‑ Je travaille en tant qu'intermédiaire, voilà pourquoi. Et j'ai pensé à toi. Je te devais bien ça. Pour effacer quelques cadavres qu'on a entre‑nous.
Il a hoché la tête, à commandé une autre bière ‑ moi, j'ai refusé, le coeur au bord des lèvres ‑ et il a empoché le bout de papier. Il s'est gratté délicatement le nez. Sa peau luisait de sueur. Ses cheveux étaient collés tels une vieille moumoute, sur le haut du crâne. Il donnait l'impression d'avoir vieilli de vingt ans, depuis notre dernière rencontre.
‑ On peut pas dire que l'autre fois, tu m'as facilité la tâche, a‑t‑il enfin laissé tomber dans l'atmosphère bourrée jusqu'à la gueule de conversations tonitruantes. Quand, avec les autres, tu as filé en me laissant en arrière‑garde, les flics n’étaient pas loin. J'ai dû me carapater par les toits et c'était glissant ce jour‑là. Je suis tombé, une de mes pattes en a pris un coup...
J'ai examiné ses yeux pendant qu'il parlait avec cette étrange voix calme. J'ai vu un brin de rancune dans son regard mais le ton de sa voix démentait mon impression. Un débit lent, des mots bredouillés et incertains. J'avais bien raison: Albert était un pauvre cave.
‑ Je voulais même te buter, a‑t‑il quand même laissé filer, dans un relatif silence.
‑ Mais tu y as renoncé car tu t'es souvenu des bons moments passés ensemble... Et puis tu t'es dit que je l'avais pas fait exprès, que c'était qu'une coïncidence... Tu avais raison, bien sûr.
Il a fini sa bière en faisant des bruits de siphon écoeurants.
‑ Bien sûr aussi, tu ne me donneras pas le nom du commanditaire?
‑ Et toi... le nom de la fille que tu filais, tout‑à‑l'heure?
‑ C'était ma femme, a‑t‑il lâché brusquement, les maxillaires crispés. Je voulais voir chez qui elle allait s'envoyer en l’air, cette garce.
***
Ça n'était pas sorcier de suivre ce brave Albert. L'enfance de l'art même. Faut dire qu'Isabelle faisait tout pour ne pas se laisser distancer.
Le plan était très simple: Isabelle avait un amant. L'amant voulait la mort du mari. Mais il fallait que ça ait l’air d'un accident ou, du moins, d'un malheureux concours de circonstances. Bien que nouveau dans le métier de tueur, je savais où j'allais. Engagé par l'amant, je devais concocter un gentil scénario afin de faire passer le cocu de vie à trépas.
C'est alors que j'avais pensé à Albert. La conversation dans le tripot m'avait édifié. Mon pote me gardait toujours une dent pour cette malheureuse histoire, c'était visible. Dommage que les flics, que j'avais appelés, aient eu du retard, à cause d'un stupide accident de la circulation qui les avait ralentis. Sinon... Ils seraient venus juste à temps pour coffrer Albert. Nous, ses potes, nous avions tous un solide alibi. Pour parfaire le plan, dans la piaule d'Albert, nous avions poussé la délicatesse jusqu'à y dissimuler quelques billets usagés et numérotés. Pour faire plus vrai. Mais notre pote avait filé ce jour‑là et nous ne l'avions plus revu.
Retrouver Albert n'avait pas été aisé. Le supprimer proprement, par contre, grâce à ce contrat, ne poserait pas beaucoup de problèmes. "Le mari est un minable, m'avait affirmé l'amant. Un type sans intérêt. Pas besoin de le décrire, c'est un passe‑muraille. Il sera chez lui vers les vingt heures et quart. Le loquet de la porte ne sera pas fermé. Il vous suffira d'utiliser une lame de couteau pour entrer...
‑ Vous serez là?
‑ Ce serait un peu stupide... Non, j'attendrai pas très loin, m'avait‑il nasillé au téléphone. On conviendra d'un signe pour me faire venir..."
Une affaire facile, donc, mais qui demandait une grande détermination. J'avais voulu savoir comment Albert s'en sortait. Le tester en quelque sorte. Il ne m'avait toujours pas repéré, au bout de trois jours, obnubilé, semblait‑il, par la femme qu'il suivait. De loin, elle paraissait bien en chair d'ailleurs. Mais je ne m'en préoccupais pas. Je n'étais pas là pour ça.
La veille du jour H, l'amant me retéléphona.
‑ Tout est O.K.?
‑ Oui. C'est Albert qui me renseignera sur l'arrivée du mari. Nous monterons immédiatement après. Nous attendrons cinq à dix minutes, puis nous entrerons et je m'arrangerai pour faire assommer le mari. Après il me suffira de tirer sur Albert. Quant au mari, il se suicidera d'une balle en plein coeur. Les empreintes sur l'arme confirmeront la thèse du suicide. Ce ne sera qu'un banal fait divers...
***
Je venais de rejoindre mon "associé" en bas de l'immeuble. Il m'avait appelé un quart d'heure plus tôt pour me signaler l'arrivée de l'époux. J'étais en train de lui expliquer le déroulement des opérations. Nous pénétrerions dans l'appartement afin de faire peur à l'amant de la femme...
‑ L'amant? Tu m'avais parlé du mari... Qu'est-ce que c'est que cette embrouille?
‑ Ne t'inquiète pas, lui ai-je répondu, avec aplomb. Jusqu'à présent, tu as été payé rubis sur l'ongle. On rentre dans la maison, on flashe les amants en train de faire ce que tu devines, et on file vite fait. Après, ça sera à l'épouse et au mari de se débrouiller... Tu vois, rien de bien compliqué.
Il n'avait pas l'air convaincu. J'ai détourné la conversation.
‑ Et en ce qui concerne ta femme? Tu m'avais dit...
‑ Tout est en ordre, à présent, m'a-t-il coupé. Bon, on y va ou on continue à bavasser?
On a grimpé deux étages sur la pointe des pieds. Une porte s'est ouverte, au quatrième, et on a dû aller se réfugier dans le réduit aux poubelles, par précaution. Enfin nous sommes arrivés devant la porte du type. Il n'y avait aucun nom. Juste un emplacement plus clair à la place qu'aurait dû occuper la carte de visite.
J'ai ouvert sans difficulté la porte, avec une tige métallique. Nous nous sommes glissés dans un vestibule sentant l'encaustique, encombré de meubles à l'ancienne surmontés de quelques souvenirs d'Afrique.
‑ La turne du bourgeois par excellence, j'ai ricané.
Derrière moi, je sentais le souffle chaud d'Albert.
Nous nous sommes guidés sur le bruit. Il provenait de la chambre. Par la porte entrouverte j'ai distingué des fesses, des mains, des seins, tout ça s'agitant en tous sens. Le mari et la femme jouaient à la bête à deux dos. Cette nana était une sacrée s...! Elle s'envoyait en l'air avec un mec qui (elle le savait) allait la quitter pour de bon dans quelques minutes...
J'ai pivoté vers Albert. Il avait sorti son flingue, le visage pâle, dévoré de tics nerveux.
‑ Tu rentres en criant Haut les Mains, d'ac? j'ai murmuré. C'est pour faire peur à cet enfoiré qui saute une bourgeoise sans avoir demandé la permission, tu comprends?
Il ne m'a rien répondu, m'a repoussé sans ménagement, a donné un violent coup de pied dans la porte qui s'est ouverte en cognant contre le mur.
J'ai entendu la voix de la femme qui criait:
‑ Albert ! Mais... Albert! Non!
J'ai juste eu le temps de flasher sur le mec qui se dégageait difficilement des cuisses de la femme. Puis il y a eu une terrible détonation. Le type a été arraché du lit par une main invisible et s'est écrasé contre la paroi, avant de se recroqueviller par terre, comme un tas de linge sale.
La femme hurlait, à présent:
‑ Albert! Mon chéri... Ce n'est pas ce que tu crois... Je t'en prie...
Quelque chose m'échappait. Mon flingue était toujours dans ma poche, lorsque un nouveau coup de feu à tonné dans la chambre. Une fleur rouge a éclaté sur la peau nacrée d'Isabelle. Sa tête a heurté violemment la chambranle du lit. Déjà Albert s'était tourné vers moi. La gueule noire de son arme me fixait d'un sale oeil.
‑ Tu m'as facilité la tâche, gros malin! a‑t‑il ricané. Tu bouges surtout pas et tu écoutes mon histoire... Il était une fois un gentil mari appelé Albert qui apprend que sa femme le trompe. Il suit la garce, repère l'amant et cherche un moyen de s'en débarrasser. C'est à ce moment qu'apparaît dans sa vie un salopard à qui il réservait un chien de sa chienne... Toi, mon gentil pote. Tu veux que je continue?
Je levai les mains, une sueur malsaine obstruant ma vision. Je me suis mis à trembler.
‑ Pas... la peine, j'ai coassé. Je t'ai amené ta vengeance sur un plateau... Et dire que je te prenais pour un taré! C'est toi, le mari que j'étais chargé de liquider... Mais lui - je désignais mon commanditaire, l'amant à la sale gueule, barbouillée de sang ‑, lui... qu'est ce qu'il fout ici?
‑ J'ai téléphoné à ce monsieur pour lui dire, de ta part, que l'affaire était reportée. Et ma chienne de femme savait, de son côté, que je ne rentrerais pas ce soir... Je savais qu'ils ne pourraient pas résister à une nouvelle partie de jambes en l'air...
Le flingue ne tremblait pas dans sa main. J'essayais d'imaginer les dégâts que ferait la balle. J'étais un véritable con. Albert m'avait eu jusqu'au trognon. Il s'était débrouillé comme un vrai chef, je devais le reconnaître, me manipulant, en prenant la place de mon commanditaire. Je me disais bien, au téléphone, que la voix me semblait contrefaite. J'étais une vraie buse.
- Tel est pris qui croyait prendre, c'est ce qu'on dit, n'est-ce pas? fit mon pote en appuyant sur la queue de détente.
L'enfoiré: il savait pourtant que je détestais les proverbes...
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"Oui, Mon Chéri, évidemment que l'on restera
toujours ensemble... Au moins jusqu'à ce que
ton cadavre ne sente pas trop mauvais..."
A powerful novel of emotional blackmail and the morality of love
(Cette meurtrière avait un étrange sens de l'humour)
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"Fumer tes ignobles clopes te tuera,
qu'elle disait... Ahaha..."
qu'elle disait... Ahaha..."
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"Mon... Aie! Chéri... Je te jure,
ce n'est pas moi qui ai pris ton doudou!"
ce n'est pas moi qui ai pris ton doudou!"
From the back:
The lure of the stage makes a perfect bait
for enticing young girls into the nefarious
white-slave trade. A dancing school is the perfect blind
to cover up these activities. Little do the victims suspect
what fate has in store for them until it is too late,
too late to escape, almost too late for help
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"Je vous en prie, entrez... Les docteurs partouzeurs
n'attendent plus que vous"
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Blanche Baptiste (dans l'esprit de Jacques Damboise...)
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