Bonjour à vous qui, dans le maelström du net, êtes arrivés, par hasard? lassitude? erreur? sur ce blog. Vous êtes les bienvenus. Vous y lirez des extraits d'articles, de pensées, d'interviews, piochés ça et là, et illustrés de photos et dessins détournés, via un humour de bon aloi. Vous pouvez évidemment réagir avec le même humour, la même ironie que nous mettons, chaque jour, à tenter de respirer un peu plus librement dans une société qui se corsète chaque fois un peu plus.
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mardi 5 mars 2013

"Ce vampire, qui buvait régulièrement de l'eau bénite, finit curé dans une région reculée de la Voïvodine". Benoît Barvin in "Pensées pensées".

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Pensées pour nous-mêmes:

(AVALE CHAQUE MATIN UN BOL
DE FRATERNITÉ)

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"Alors, Muse! Tu n'oses répondre à mes questions
existentielles, n'est-ce pas?"

Le Sang D’Un Poète (Jean Cocteau, 1930)
(Étrangement, cette statue refusait de répondre)

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L'autre visage du Qatar
ARMIN AREFI

   (...) On peut encourager les révoltes du Printemps arabe et tout faire pour que le mouvement de contestation n'atteigne pas son territoire. Ce curieux paradoxe est illustré à merveille par le Qatar. Le richissime émirat gazier du Golfe vient de condamner à quinze ans de prison un poète qatari pour avoir écrit une oeuvre sur le Printemps arabe. Dans son "poème du Jasmin" récité en août 2010, Mohammed Al-Ajami, plus connu sous la plume de Ibn al-Dhib, rend hommage à l'opposant historique tunisien Rached Ghannouchi, de retour dans son pays après un exil de vingt ans à Londres.

  Son parti islamiste, Ennahda, remportera deux mois plus tard les premières élections organisées après la chute de l'ancien président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali (et, depuis, les choses vont de mal en pis...). 

   Prononcé devant plusieurs de ses amis dans un appartement du Caire, où l'artiste étudie la littérature arabe, le poème hisse la révolution du Jasmin au rang d'exemple. Ibn al-Dhib y exprime l'espoir que le vent de révolte né en Tunisie touche à leur tour les monarchies arabes du Golfe. Sans évoquer directement le Qatar, il lance toutefois : "Nous somme tous la Tunisie face à une élite répressive." Et l'artiste d'ajouter : "J'espère que viendra bientôt le tour des pays dont le dirigeant s'appuie sur les forces américaines." Une allusion à peine voilée à son pays, qui abrite depuis 2002 des soldats américains sur la base aérienne d'Al-Eideïd. (...)

   Filmée et diffusée sur YouTube, la scène suscite l'ire de l'émir Hamad bin Khalifa al-Thani, qui tient le pays depuis qu'il a destitué son père en 1995. "Il y a au Qatar un certain nombre de tabous révélateurs d'une forme de conservatisme de la société, et l'intégrité de la famille royale en fait partie", explique au Point.fr Nabil Ennasri, doctorant spécialisé sur le Qatar à l'université d'Aix en Provence. "C'est un sujet auquel il ne faut pas s'attaquer."

   Arrêté en novembre 2011, Ibn al-Dhib est placé en confinement solitaire pendant plusieurs mois, selon son avocat, Nadjib al-Naimi, ancien ministre de la Justice de l'émirat. Son procès, auquel il n'est même pas autorisé à assister, a lieu un an plus tard. La peine est des plus sévères : le poète qatari est condamné à la prison à vie pour "atteinte aux symboles de l'État et incitation à renverser le pouvoir". Pourtant, d'après son avocat, aucune preuve n'a démontré que le poème a été récité en public. (...)
Lire sur:

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"Allez, sois sympa! Tends ta papatte, quoi!
- Et pourquoi faire, Monsieur?
Je ne vous connais pas, Moi!"

Baby Chameleons | Igor Siwanowicz

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(La nouvelle pornographie italienne
avait quelque chose de... hem...
touchant...)


ITALIE 
Débandade dans le porno transalpin
Anaïs Demont 

   (...) Les grands noms du film porno italien, Rocco Siffredi ou Cicciolina e tutti quanti, n'exaltent plus le public. C'est ce que conclut Il Fatto Quotidianoaprès l'échec du dernier Sex Festival de Milan.

   Le Sex Festival de Milan, qui a fêté ses 18 ans, affichait près de 60 000 visiteurs lors de la première édition. Depuis, l'affluence s'est peu à peu réduite (seules près de 160 personnes avaient payé l'entrée selon le magazine Vice) et cette année la "kermesse" du sexe semblait morose, affirme Il Fatto Quotidiano.

   Malgré quelques stars européennes qui réussissent à maintenir l'intérêt des spectateurs, les stands du festival brillent par leur routine, "le sexy bar, la dominatrice qui se ballade avec son esclave en laisse, les massages érotiques et peu d'autres choses", selon le quotidien.

   Tous les protagonistes présents au festival ont affiché désolation et résignation. En cause, plusieurs phénomènes – dont la disparition de Riccardo Schicchi, qui était producteur et réalisateur de films pornographiques. Survenue en décembre 2012, sa mort "a été la pierre tombale sur la production du porno made in Italy", souligne le quotidien.

   A cela s'ajoute la rude concurrence de Youporn, qui n'a plus rien à envier aux lumières rouges et aux ambiances aguicheuses du Sex Festival. Le sexe 2.0 n'a laissé aucune chance à la production de films qui pâtissent des coûts élevés de tournage et de taxes exorbitantes. De plus, les postes sont précaires, comme l'indique Rebecca au journal Il Fatto Quotidiano : "Je fais des soirées dans des clubs, de petits films, mais je travaille aussi comme escort : je dois m'arranger."

   Pour une scène avec des actrices populaires, les réalisateurs doivent investir entre "600 et 700 euros", rapporte le quotidien. A ce prix-là, les réalisateurs ont préféré organiser des essais gratuits durant le festival afin de recruter des amateurs.

   Au sujet de ce changement logistique, Francesco Malcom, acteur de films porno italien, déclare avec philosophie : "C'est comme en politique : il n'y a plus d'idées, il n'y a plus de possibilités et les vieux protagonistes font confiance à la société civile." (...)


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Benoît Barvin

jeudi 16 août 2012

"Il aimait toutes les femmes, même les non-moches". Benoît Barvin in "Pensées pensées"

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Pensées pour nous-mêmes:

(DONNE-TOI LA FORCE
D'ETRE LE PLUS FAIBLE POSSIBLE)

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"Aie! Tu m'étrangles!
- Ma Chérie, tu n'avais qu'à pas t'emberlificoter
dans ces bijoux de pacotilles...
Est-ce que moi je l'ai fait, hein?"

Tamara Karsavina, 1910 (via)
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"Bon, assez joué, il est temps
d'aller lire!"

Des microbibliothèques 
qui favorisent des mégarelations
Martha Groves 

   (...) Jonathan Beggs cherchait une façon simple d'échanger des livres avec ses voisins. En bricolant des panneaux en fibres de verre et en pin, l'entrepreneur en bâtiment à la retraite a conçu une bibliothèque de la taille d'une maison de poupées, coiffée d'un toit de bardeaux de cèdre et de cuivre. Derrière une porte rouge vif se cachent trois étagères remplies de livres de Joyce Carol Oates, Tony Hillerman, James Michener et bien d'autres encore. Un panneau situé au-dessous de la boîte indique : "Prenez un livre ou laissez-en un, ou les deux." 

   En un an et demi d'existence, la microbibliothèque gratuite de J. Beggs, une boîte perchée sur un poteau devant sa maison de Sherman Oaks à Los Angeles, est devenue bien plus qu'un simple lieu d'échange. Elle a permis à des étrangers de devenir amis et a transformé un quartier parfois impersonnel en une véritable communauté. Elle est devenue le cœur d'un minivillage, où les gens se retrouvent pour parler de Sherlock Holmes, de développement durable et de généalogie. "J'ai rencontré plus de voisins pendant les trois premières semaines qu'en trente ans", affirme J. Beggs, qui a 76 ans. (...)

   Il fait partie d'un groupe qui travaille sur l'autosuffisance. C'est l'un de ses membres qui lui a fait connaître le principe des microbibliothèques. "L'idée m'a tellement plu que j'en ai construit une", explique-t-il. "C'était très amusant." Sa microbibliothèque s'inscrit dans un mouvement né dans le Wisconsin et qui commence à se répandre en Californie. Dans les grandes métropoles et les petites villes comme dans les banlieues et les communautés rurales, les partisans de l'initiative s'enthousiasment de pouvoir ainsi transmettre des livres à des bibliophiles chevronnés comme à des lecteurs en herbe

   Comme le souligne Dana Cuff, professeure à l'université de Californie à Los Angeles (Ucla), les gens aiment faire circuler leurs livres favoris car cela répond à leur désir d'établir un contact humain réel à une époque où la communication se fait souvent par SMS ou par Facebook. "Faire partager à petite échelle une chose qui nous est chère, c'est comme apporter des tomates au voisin qui nous a prêté du sucre", poursuit Dana Cuff. "Cela nous permet de nous rapprocher des gens qui vivent autour de nous." 

   Le mouvement Little Free Library a été lancé par Todd Bol qui, à l'automne 2009, a voulu rendre hommage à sa défunte mère, une enseignante passionnée de littérature. Il a ainsi fabriqué une école miniature en bois, qu'il a installée devant sa maison à Hudson (Wisconsin) et remplie de livres. Même les jours de pluie, ses amis et voisins venaient choisir et déposer des livres, ou le complimenter sur sa jolie bibliothèque. Spécialiste du développement dans le commerce international, T. Bol a confié à Rick Brooks, expert en sensibilisation et information des communautés, la tâche de faire connaître son projet. 

   Ces deux dernières années, près de 1 800 "bibliothécaires" ont rejoint le mouvement, dans environ 45 Etats américains et des dizaines de pays, dont le Ghana, le Royaume-Uni et l'Allemagne. En échange de 25 dollars [21 euros], Little Free Library – une association à but non lucratif – fournit aux propriétaires un panneau et un code de suivi. On trouve sur le site Internet de l'association une carte qui recense toutes les microbibliothèques, ainsi que des photos des inaugurations en grande pompe. D'après Todd Bol, le réseau rassemblait environ 3 000 microbibliothèques à la fin du mois de juillet. (...)




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"Comment?
- Dégage de là, y'a un train qui est prévu!
- J'entends rien! C'est à cause du train qui s'annonce..."

Serban Savu. The Tunnel.

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"Bon, chéri, c'est pour aujourd'hui
ou pour demain?"

Deadwood prostitute around the turn of the century


Génération Y, génération X ?
Enquête, par Anne Dhoquois

   (...) « Sodomie, éjaculation faciale ou double pénétration, à en croire les articles sur le sujet dans la presse, ces pratiques feraient partie du répertoire sexuel habituel de la génération Y. » C’est en ces termes que Julia Tissier et Myriam Levain, jeunes journalistes dans la vingtaine et auteur du livre La génération Y par elle-même (éd. François Bourin, 2012), introduisent leur chapitre sur la sexualité au titre évocateur « Ils sont dopés au porno ». L’ouvrage égrène en effet les idées reçues sur la jeunesse d’aujourd’hui et le rapport à la sexualité n’échappe pas à leur plaidoyer pour un regard plus nuancé sur les coutumes de l’époque. De fait, on ne peut dissocier la sexualité de la société et de son évolution mais concernant les Y, Nathalie Bajos, directrice de recherche à l’Inserm et coauteur de Enquête sur la sexualité en France (éd. La Découverte, 2008), est formelle :
   « Dans le domaine des attitudes sur la sexualité, il n’y a plus aujourd’hui de clivage marqué entre les jeunes et leurs parents mais plutôt une absence d’opposition entre générations. » Ghislaine Paris, médecin sexologue, confirme: « Dans les années 1968-1970, il y a eu un séisme provoquant une révolution toute à la fois sexuelle, culturelle, sociale, philosophique… Les parents des Y ont construit leur vie d’adulte à partir de cette révolution et ce mouvement se répercute encore aujourd’hui ; leurs enfants prennent la suite. » La libération sexuelle, l’éclatement du modèle familial traditionnel ont été initiés par les parents des Y, mus à l’époque par une recherche d’idéal qui a depuis pris du plomb dans l’aile. Dans les années 1970, on a cru qu’en rejetant le modèle passé, on allait trouver le bonheur… Sauf que la fin du couple traditionnel comme unique référence a généré des échecs, des ruptures, des divorces en hausse. 

   « Les jeunes d’aujourd’hui ont les pieds sur terre. Ils tentent de tirer les leçons de tout cela; ils savent que les solutions ne sont pas simples à trouver et qu’il faut les inventer. Et du coup ils tâtonnent… », poursuit Ghislaine Paris. Ils tâtonnent d’autant plus que l’une des évolutions majeures dans le champ de l’intime, « c’est l’individualisation des normes, affirme Nathalie Bajos. Avant, quelques grandes institutions (État, Église, etc.) tenaient un discours normatif et cohérent sur la sexualité. Aujourd’hui, il y a une multitude de sources normatives ; les jeunes sont confrontés à des discours émanant des parents, de l’école, de leurs pairs, des médias, des médecins. À la maison, les parents mettent en valeur un certain type de comportement, qui peut être différent de ceux valorisés à la télévision ou en classe. À chacun de donner une cohérence à l’ensemble de ces discours et de ces injonctions éventuellement contradictoires. » 

   (...) Parmi les discours prégnants de l’époque, ceux émanant des médias occupent une place prépondérante. Julia Tissier et Myriam Levain écrivent même dans leur livre que la norme qui s’appelait autrefois morale est aujourd’hui en partie médiatique : « Nous avons grandi dans une société où le sexe est pratiquement partout, où les articles de presse et les émissions de télévision sur le sujet sont pléthores. Le risque ? Voir émerger une norme. La sodomie ? Nous devons en être passés par là. La fellation et le cunnilingus ? Toujours, même avant le petitdéj. La levrette ? Bien sûr, c’est le nouveau missionnaire […]. Les diktats sexuels vont de mal en pis. » Diktat, le mot est fort. Et à en croire Ghislaine Paris non seulement il n’est pas galvaudé mais il fait des dégâts : « Le tabou et le sacré ne sont pas dissociables de la sexualité. La dimension spirituelle de la sexualité, c’est ce qui l’humanise. Les Y ont accès à la communication tous azimuts, à une prolifération d’images… Ils ont cru que la sexualité était tombée dans le domaine public et que toute pudeur et intimité avaient disparu. Ce n’est pas vrai et ce n’est pas possible. Par ailleurs, les médias font passer des informations erronées en valorisant des pratiques encore marginales telles que l’échangisme ou la sodomie et en les érigeant en normes. Or ne pas être dans la norme crée une angoisse. » 

   L’enquête de Nathalie Bajos et Michel Bozon confirme, chiffres à l’appui, qu’il existe un décalage entre le discours médiatique sur la sexualité et la réalité. Ainsi, seulement 36,1 % des hommes et 28,3 % des femmes entre 20 et 24 ans ont pratiqué au moins une fois la sodomie. Mais, même si les diktats existent, ils ne sont pas forcément synonymes de mal-être. Nathalie Bajos prend l’exemple suivant : « Les journaux féminins valorisent une vie sexuelle régulière, épanouie, etc. Sans cela, pas de bien-être possible. Or dans l’enquête, nous avons interviewé des individus qui n’ont pas eu pendant longtemps de vie sexuelle et qui se portent très bien. » (...)




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Luc Desle

jeudi 20 mai 2010

EPOXY. JEAN VAN HAMME. PAUL CUVELIER. "la pornographie c'est l'érotisme des autres". André Breton

(c) EPOXY. LOMBARD EDITEUR. (Disponible)
DESSIN: PAUL CUVELIER. SCENARIO: JEAN VAN HAMME.

http://www.altersexualite.com/spip.php?article552


   Devant ce qu'on appelle communément l'érotisme, il est de bon ton de faire la moue. Celui-ci serait "trop quelque chose", et "pas assez autre chose". Par contre tout le monde - ou presque - est d'accord pour préférer l'érotisme à l'immonde pornographie qui elle serait sale, dégradante, honteuse, impie, ignoble, etc. Dès que l'on cherche à connaître le "sens" des mots, les définitions, comme à l'habitude, se chevauchent, se contredisent, deviennent au final aussi molles que certains organes dans ces récits, bd ou films de genre... 

   L'hypocrisie ambiante fait que si, aux États-Unis, une chanteuse montre un sein - par hasard ou calcul -, elle est contrainte ensuite de s'excuser piteusement, alors que les images de boucheries humaines, les gros flingues et la notion même de combat constant et de guerre juste(!) ruissellent dans le quotidien de nos cousins d'outre atlantique. Sans que cela leur pose un quelconque problème de conscience. Ils sont même prêts à défiler en de gigantesques manifestations pour réclamer que jamais on n'abroge le deuxième amendement de la Constitution, celui qui garantit à tout citoyen du pays de porter des armes.

   Dans notre vieille Europe, avec l'intrusion, à nouveau, de la religion  comme force lente mais constante pesant sur les institutions - cette fois elle est musulmane, après avoir été chrétienne -, le monde laïque titube, travaillé par une mauvaise foi suintant du catholicisme dont certains peuples pensaient qu'il était devenu enfin mûr pour épouser ses pensées et envies, sans autre intervention que folklorique. Dans la logique de sa "création", toute religion devrait être là pour accompagner au jour le jour les hommes et les femmes, pour les bercer, pour jouer le rôle d'une mère à la tendresse constante et à l'humanisme imperturbable. De nos jours, force est de constater que tel n'est pas le cas avec les 3 religions du Dieu unique, alliées peu ou prou au capitalisme mondialisé qui pille les richesses de la Terre. Les guerres saintes(!) se succèdent et les mères de toutes origines pleurent des larmes de sang face aux cadavres de leurs enfants... quand elles n'encouragent pas leur progéniture à l'immolation par on ne sait quelle aberration intellectuelle.

   Dans ce contexte tendu, l'érotisme, plus que tout autre activité humaine, focalise les contradictions internes qui se meuvent en chacun de nous. Le moment intime, celui de la nudité, non pas journalière devant son miroir ou dans sa douche, mais face à un ou une autre, ce moment-là est souvent - toujours ? - d'une crudité intolérable. Réussir une vie amoureuse passe forcément, en tout cas les premières années de la vie, par l'apothéose des sens, apothéose qui, bien souvent, ressemble à un shoot. Une fois goûté aux plaisirs des caresses et, disons-le tout net, des différentes "pénétrations", l'homme et la femme ne peuvent plus s'en passer. Ou s'imaginent que. Et les commerçants du "Temple" consommation en profitent...

   Cependant, dans l'acte amoureux se joue l'idée d'une transcendance, via la sexualité, qui déboussole la structure même de l'Etre. L'acmé érotique transforme chacun de nous en une petite déité, déstructurant le fragile équilibre que nous avons patiemment - ou inconsciemment - édifié. Ce n'est pas pour rien que le langage populaire parle de "baiser" pour "faire l'amour" et de "se faire baiser" pour "être berné", "être piégé". Car c'est vraiment de cela dont il s'agit quand deux personnes sont face à face, nues dans un lit - ou en tout autre endroit. La construction égotiste risque à tout moment d'imploser, en raison de l'étonnant ébranlement des certitudes qu'implique une relation sexuelle réussie.

   On comprend mieux, dans ces conditions, alors que le mano à mano amoureux  met en scène l'individu et sa relation au monde enfin débarrassée de préjugés moraux, que les différentes religions ruent dans les brancards, désignant à la vindicte populaire cette relation impie qui, bien vécue, est capable de désinhiber enfin le "patient" humain. Et de lui déciller les yeux - et la cervelle - face aux "vérités"religieuses, politiques et économiques.
   Ce sont toutes ces raisons qui m'ont donné envie de parler de la bd ci-dessous.

http://www.altersexualite.com/spip.php?article552


   "EPOXY" est une bande dessinée scénarisée par Jean Van Hamme - créateur des célébrissimes séries "Thorgal", "XIII" et "Largo Winch", entre autres -  et dessinée par Paul Cuvelier. De ce dernier on connaît les séries "Corentin", "Line" et "Flamme d'argent".
   En 1968, les deux auteurs sortent une bande dessinée "érotique", donc, chez Eric Losfeld, l'éditeur sulfureux de l'époque. L'histoire est on ne peut plus simple: Epoxy est une jeune femme qui plonge dans un univers parallèle où vivent les personnages de la mythologie grecque. Elle est en bute aux assauts sexuels répétés de la part de la reine des amazones, de Thésée, de Pan, d'Hermes, etc. Les amours saphiques ou orgiaques lui sont offertes, ainsi d'ailleurs qu'un viol, consenti sans trop de problème, années libertaires obligent.

   Le fil narratif accompagne avec simplicité les pérégrinations de la jeune femme dans cet univers des désirs premiers, se promenant toujours étonnamment nue, dans un monde grec dont  les dieux, déesses et héros nous sont familiers. L'ambiance générale est à la "décontraction" des sens, au plaisir, à l'absence de morale - bien que cette bd ne soit en rien immorale.


   Ce qui fait la force de ces 70 planches, plus de 40 ans plus tard, c'est l'incroyable osmose qui lie l'histoire aux dessins. Paul Cuvelier est à cette époque "au sommet de sa force créative", de sorte que chaque vignette est un régal pour les yeux. Epoxy, nue comme la vérité, est croquée sans malignité, avec une joie du trait qui transcende le sujet.  Pour échapper à la Censure, ni les sexes masculins, ni ceux des jeunes femmes ne sont montrés, de sorte que l'érotisme, ici, est bon enfant, presque naïf. Ce qui tranche agréablement avec la vulgate d'aujourd'hui.

   Dans "Epoxy", nous nous trouvons face à un véritable maître du nu classique, même si la "forme" bd  ne permet pas à l'artiste d'aller jusqu'au bout de son art. Cependant l'héroïne - certainement "croquée" sur le vif - est dessinée dans toutes les situations possibles, la "caméra" pinceau utilisée par Paul Cuvelier tournoyant en tous sens autour de ce corps offert à notre contemplation muette et fascinée. 

   A la fin de l'histoire Epoxy, revenue des Enfers, c'est-à-dire du cœur d'un volcan, y replonge, alors que celui-ci explose en un geyser brûlant, métaphore transparente du désir érotique. Et c'est à cet instant que le lecteur réalise combien cette attraction des corps, pour aphrodisiaque qu'elle paraisse de prime abord, est également mortifère, car séparant le couple sexuel de la société, tout au moins le temps de sa fusion.

"Epoxy", dans un "simple" récit de bd, expose ainsi avec bonhomie les joies et les dangers inhérents au désir érotique.


   Une vision intéressante de cette bd est proposée par le blog mis en lien. 

Blanche Baptiste